COMMENTAIRE n° 71Publication du SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ
PÉNURIES DE RESSOURCES ET CONFLITS
Peter Gizewski
Printemps 1997
Non classifié
Note du rédacteur :
Peter Gizewski est premier agrégé, Project on Environment Population and Security, Peace and Conflict Studies, University of Toronto.Dans ce numéro de Commentaire, il fait un tour d'horizon sur les pénuries des ressources et les conflits qui s'en suivent dans divers pays du monde.
Avertissement: Le fait qu'un article soit publié dans COMMENTAIRE ne signifie pas que le SCRS a confirmé l'authenticité des informations qui y sont contenues ni qu'il appuie les opinions de l'auteur.
Introduction
Au cours des dix dernières années, on en est venu à reconnaître davantage l'important rôle que joue l'environnement dans la sécurité nationale et internationale. En 1987, la Commission mondiale de l'environnement et du développement des Nations-unies a souligné que le stress environnemental pouvait non seulement constituer une source de conflit, mais en être l'aboutissement. En 1992,
le Conseil de sécurité des Nations unies a indiqué que les
menaces envers la paix et la stabilité à caractère
militaire et politique provoquaient de l'instabilité aux plans
économique, social, humanitaire et écologique. Deux ans plus
tard, l'Administration Clinton a observé que le terrorisme, le trafic
des stupéfiants, la dégradation de l'environnement, l'explosion
démographique et le flux de réfugiés étaient tous
des phénomènes ayant de sérieuses répercussions sur
la politique américaine à court et à long terme et la
sécurité.
Un certain nombre de facteurs expliquent l'intérêt que suscite
la question de l'environnement à titre d'élément qui
menace la sécurité. La fin de la guerre froide a permis aux
décideurs de détourner leur attention des rivalités entre
les superpuissances pour se concentrer sur les nouveaux éléments
qui menacent la sécurité internationale. Par ailleurs, la
montée constante des conflits civils infranationaux et à
caractère religieux et ethnique, et ce, souvent dans des États
aux prises avec d'importantes pénuries de ressources, a amené bon
nombre d'observateurs à croire à l'existence d'un lien de
causalité entre ces deux phénomènes.
De nombreux observateurs ont d'ailleurs confirmé, ces
dernières années, l'existence d'une corrélation entre les
tensions environnementales, d'une part, et la violence et les problèmes
de sécurité, d'autre part. Ceux qui croient à cette
corrélation ont toutefois tendance à sensationnaliser la
question, à faire abstraction des recherches empiriques et à
exagérer l'importance du stress environnemental à titre de source
de conflit. En fait, jusqu'à tout récemment, les savants et les
décideurs comprenaient assez mal le lien de causalité qui peut
exister entre les pénuries de ressources et la violence.
Des études récentes ont toutefois permis de combler cette
lacune, du moins en partie. Se fondant sur une série d'exemples
détaillés de cas où les conditions environnementales
contribuent, à première vue, à l'instabilité
sociale, ces études font état d'un lien de causalité entre
la pénurie et les conflits et expliquent ces liens et les conditions qui
favorisent leur développement.
Aperçu général
Les études actuelles sur les liens qui existent entre l'environnement
et les conflits mettent l'accent sur les risques de conflit que
présentent les pénuries de ressources renouvelables
(c.-à-d., terres cultivables, eau potable, bois de chauffage et
poisson). Alors qu'on reconnaît depuis longtemps l'importance
stratégique des ressources non renouvelables, comme le pétrole et
les minéraux, les forces du marché qui contribuent à
réduire la demande pour ces ressources en favorisant le recours à
des substituts et à des innovations techniques ont servi à
atténuer les pénuries dans ces secteurs et les risques de conflit
y rattachés. Ces forces n'ont toutefois pas réussi dans la
même mesure à prévenir les pénuries de ressources
renouvelables, qui, comme on le démontre de plus en plus, menacent la
stabilité interne de nombreux pays en développement.
D'après M. Thomas Homer-Dixon, de la University of Toronto, les
pénuries de terres agricoles, de forêts, d'eau potable et de
poisson sont celles qui contribuent le plus à susciter de la violence.
Ces pénuries peuvent être liées à la demande,
c'est-à-dire à la croissance démographique dans une
région. Par contre, elles peuvent être attribuables à
l'offre, situation qui découle de la dégradation des ressources
dans une région ou à une répartition inéquitable
des ressources dans la société. Ces trois
phénomènes ne s'excluent pas mutuellement et il arrive même
souvent qu'ils se présentent simultanément et qu'ils agissent les
uns sur les autres.
La dégradation et l'épuisement des ressources renouvelables
peuvent avoir tout un éventail de conséquences sociales. Par
exemple, ces conditions peuvent inciter les groupes plus puissants de la
société à modifier la répartition des ressources en
leur faveur. Ce phénomène, que l'on peut qualifier de
«monopolisation des ressources», génère des
bénéfices pour l'élite, tout en intensifiant les effets
des pénuries sur les pauvres et les faibles de la société.
Il en découle souvent un autre phénomène, celui de la
«marginalisation écologique», qui oblige les groupes les plus
pauvres à chercher des moyens de survie dans des régions plus
fragiles sur le plan écologique telles les hautes terres en pente, les
régions menacées de désertification, les forêts
ombrophiles et les terres publiques de piètre qualité
situées en milieu urbain. La haute densité de population dans ces
régions, conjuguée à l'absence de capitaux pour
protéger l'écosystème local, provoque de graves
pénuries de ressources et la pauvreté chronique.
Les pénuries entraînent d'autres conséquences sociales :
dégradation des terres agricoles, appauvrissement des économies
régionales, exode des populations et perturbation des institutions
légitimes et des relations sociales. Élément encore plus
important, les pénuries peuvent, soit individuellement, soit
collectivement, créer des forces et des phénomènes qui
suscitent des conflits violents entre différents groupes de la
société.
Les différents groupes aux prises avec des pénuries peuvent en
venir à s'identifier encore davantage en fonction de leur origine
ethnique, de leur classe ou de leur appartenance religieuse, en raison de la
concurrence plus vive qui se livre pour l'obtention des ressources qui se font
de plus en plus rares. En même temps, les pénuries peuvent
contribuer à miner la légitimité de l'État et sa
capacité de relever les défis. À mesure que le pouvoir
passe graduellement des mains des gouvernements à celles des groupes
contestataires, les risques de violence augmentent. Cette violence, qui a
tendance à être de nature diffuse et persistante, est
habituellement à caractère infranational.
Les pouvoirs publics peuvent se révéler capables de s'adapter
aux pénuries et ainsi d'éviter la souffrance et le stress social
qui en découlent. Par exemple, ils peuvent adopter des programmes et des
politiques qui favorisent une utilisation plus durable des ressources. Ils
peuvent aussi cesser progressivement de dépendre de ressources rares en
produisant des biens et des services qui comptent moins sur ces ressources. Les
produits ainsi fabriqués pourraient alors être
échangés contre des articles dont la production est devenue
impossible à cause des pénuries locales. En
réalité, toutefois, les pouvoirs publics n'ont habituellement pas
l'ingéniosité sociale et technique nécessaire pour
s'adapter aux pénuries.
Informations probantes
Le projet de recherche effectué dans le cadre du programme
d'études sur la paix et les conflits de la University of Toronto et
intitulé Project on Environment, Population and Security,
documente amplement les phénomènes et les conséquences
dont il vient d'être question. En fait, les études de cas qui
analysent le lien entre les pénuries de ressources et les conflits
violents font état des risques de conflit que suscitent les
pénuries dans diverses régions, dont le Mexique (Chiapas), le
Moyen-Orient (Gaza), le Pakistan et l'Afrique du Sud.
a) Mexique : Chiapas
En janvier 1994, des rebelles masqués se sont emparés de la
capitale de l'État mexicain du Chiapas, San Cristobal, et y ont
instauré un gouvernement révolutionnaire. L'Ejercito Zapatista
de Liberacion National (EZLN) (Armée zapatiste de libération
nationale), mieux connue sous le nom de Zapatistas, a détenu le
pouvoir pendant quatre jours seulement. La rébellion a pourtant
réussi à mettre en doute aux yeux de tous les Mexicains la
légitimité du parti au pouvoir, le Partido Revolucionario
Institucional (PRI) (Parti révolutionnaire institutionnel), et a eu
de graves conséquences sur le plan international. Cet
événement a engendré une crise du peso; le Mexique et ses
partenaires commerciaux de l'ALÉNA, les États-Unis et le Canada,
ont perdu des milliards de dollars dans leurs efforts visant à stopper
la dévaluation importante de la monnaie mexicaine.
L'insurrection était attribuable en partie aux politiques du
gouvernement corporatiste mexicain, victime d'une libéralisation
économique trop rapide, et en partie aux efforts des milieux religieux
et activistes afin d'éveiller la population indigène du Chiapas
aux injustices que leur faisaient subir les élites locales et
gouvernementales. Toutefois, elle était également imputable dans
une large mesure à la pénurie croissante de ressources. En fait,
ce sont ces pénuries qui ont favorisé la montée des
rebelles Zapatista et leur succès, la population indigène
ayant atteint un niveau de mécontentement insoutenable.
La population indigène du Chiapas a toujours vécu dans des
conditions précaires. Limitée dans les emplois qu'elle peut
occuper, ceux-ci étant principalement restreints au domaine de
l'agriculture, et forcée de subsister sur un salaire minimum ou moindre,
elle tranche avec les élites locales, qui négocient des modes de
tenure foncière pour maintenir leur domination politique et
économique dans la région. Les agriculteurs de subsistance
détiennent en moyenne deux hectares, alors que les producteurs
commerciaux en possèdent vingt. Les programmes malhonnêtes de
crédits et d'impôt et l'absence des économies
d'échelle dont jouissent les grands producteurs agricoles creusent
encore davantage le fossé entre les deux groupes. L'infrastructure
sociale inadéquate, par exemple, le manque d'eau potable,
d'électricité et de services d'éducation et de
santé, constitue un facteur qui ne fait qu'accroître le niveau de
pauvreté au sein de la population indigène.
Au fil des années, le PRI et les élites locales avaient
réussi à distribuer juste assez de terres à la population
indigène pour tenir compte de sa croissance démographique.
Toutefois, au cours des années 1980, les terres agricoles arables sont
devenues de plus en plus rares en raison de l'explosion démographique et
de la dégradation des terres. L'accroissement de 4,6 p. 100 de la
population indigène, ajouté à un afflux constant de
réfugiés fuyant les conflits civils au Guatemala, a vite fait de
réduire la quantité de terres disponibles, de sorte que la
plupart des terres potentiellement arables à l'extérieur des
réserves biologiques étaient occupées. La
déforestation de la forêt ombrophile des Lancandons a
été à l'origine de graves pénuries de combustible
dans les communautés locales, et l'érosion causée par le
vent et l'eau dans divers secteurs de la région a elle aussi
contribué à réduire le nombre de terres cultivables.
Face à cette situation, les élites et les riches
propriétaires terriens ont renversé les politiques de
réforme agraire afin de s'emparer des meilleures terres. Les paysans ont
été forcés de se déplacer vers la
périphérie de la forêt ombrophile. Toutefois, à
mesure qu'ils défrichaient de nouvelles terres, soit que celles-ci leur
étaient confisquées par les riches élites, soit qu'elles
tombaient rapidement en état de dégradation. En 1983, plus de 100
000 personnes se trouvaient sans terre et les paysans ont commencé
à pénétrer encore plus loin dans la forêt
ombrophile. La course aux terres arables s'est intensifiée parmi les
agriculteurs, les propriétaires de ranches, les squatters, les
bûcherons et la population indigène. On s'est mis de plus en plus
à protester contre la violation des droits fonciers par les
élites du gouvernement.
En 1992, le gouvernement a adopté, dans le cadre de son programme
global de réforme économique, une loi de réforme agraire
qui éliminait les mesures de protection dont jouissaient
théoriquement les communautés paysannes qui exploitaient des
terres publiques. Les droits fonciers des indigènes n'étant plus
protégés par la loi, les élites ont intensifié
leurs efforts afin d'accaparer les bonnes terres, causant ainsi une
marginalisation encore plus importante des paysans.
Le climat qui régnait alors et qui était
caractérisé par des tensions environnementales, une
pénurie de terres et un sentiment croissant d'insatisfaction parmi les
paysans s'est avéré être un ferment idéal de
contestation de l'autorité gouvernementale par les rebelles zapatistes.
L'EZLN a rapidement adopté le rôle de protectrice de la population
indigène, accusant le régime d'être à l'origine de
l'appauvrissement de cette dernière et mettant de l'avant un programme
de redistribution foncière et de réforme démocratique
à l'appui de la cause des paysans. L'EZLN a trouvé ses plus
grands appuis dans les régions où les tensions environnementales
se faisaient le plus sentir, c'est-à-dire dans les hautes terres et dans
les plateaux de l'est. Affaibli par la réforme économique et par
une opposition croissante à l'égard de ses politiques, le PRI
s'est montré de moins en moins apte à mettre les rebelles
zapatistes en échec. En 1994, la crise de légitimité du
gouvernement et son inertie, conjuguées au mécontentement accru
des paysans, ont provoqué le déclenchement d'une rébellion
armée.
Le climat d'instabilité règne toujours. Le PRI négocie
également avec les rebelles dans l'espoir de régler le conflit.
b) Moyen-Orient : Gaza
À Gaza, les conflits représentent une réalité de
la vie courante depuis la fin des années 1980. L'intifada, un
soulèvement populaire spontané mais durable contre les soldats
israéliens dans le but de mettre fin au contrôle exercé par
Israël dans la bande de Gaza, a débuté en 1987 dans le camp
de réfugiés de Jabalya, à Gaza. Le conflit a
entraîné de nombreuses pertes de vie tant dans le camp
israélien que dans le camp palestinien et a été à
l'origine d'une détérioration des conditions de vie et d'une
montée de la violence entre Palestiniens.
Alors qu'on espérait que l'accession des Palestiniens à une
certaine autonomie à Gaza apporte la paix à la région,
l'instabilité et la violence y persistent toujours. Le transfert par
Israël de son pouvoir régional à une autorité
palestinienne (AP) n'a pas donné lieu à une amélioration
des conditions socio-économiques qui règnent à Gaza. C'est
un échec qui a contribué à la montée de la
popularité de groupes islamiques comme le Hamas et la
Jihad islamique, aux tensions entre les partisans de ces groupes et l'AP
et aux violents affrontements avec la police d'Arafat.
Les causes profondes de ces tensions et conflits sont d'origine politique.
Toutefois, les pénuries de ressources ont elles aussi contribué
au problème. La pénurie d'eau notamment a joué un
rôle important dans la création d'un climat d'instabilité.
L'économie de Gaza, axée sur l'agriculture, a toujours
été à la merci des conditions arides et semi-arides de la
région. Le taux annuel moyen de précipitations est de 117
millions de mètres cubes; il faut 40 p. 100 de cette eau pour
réalimenter le seul réservoir aquifère à eau douce
souterrain de la région. Même s'il représente la principale
source d'eau de la population locale, ce réservoir aquifère
risque toujours d'être infiltré par de l'eau salée ou
d'être contaminé par des polluants agricoles et industriels.
On évalue la population de Gaza à 700 000 ou 800 000
habitants, la densité moyenne de la population oscillant entre 1 936 et
2 055 personnes le kilomètre carré. La densité est
à son niveau le plus élevé dans les camps de
réfugiés. Par exemple, le camp de Jabalya compte l'une des
densités de population les plus élevées au monde
(c.-à-d. 100 000 person-nes/km2). De plus, la population
s'accroît à un rythme variant de 5,2 p. 100 à 6 p. 100, le
taux de fécondité le plus élevé étant
enregistré chez les réfugiés.
Compte tenu de ces circonstances, les sources d'alimentation en eau potable
ne sont maintenant plus suffisantes pour répondre aux besoins. La
consommation d'eau provenant des nappes souterraines dépasse sans cesse
le taux d'alimentation durable. Chaque année, les Palestiniens
consomment deux fois plus d'eau que le taux d'alimentation durable, et bon
nombre de puits ont été creusés illégalement afin
de permettre le retrait de réserves supplémentaires du
réservoir aquifère.
Cette surutilisation constante de l'eau du réservoir aquifère
a provoqué une chute des niveaux phréatiques, l'intrusion du sel
et la contamination par des produits chimiques. La salinité de l'eau des
nappes souterraines de Gaza oscille entre 650 à 3 600 milligrammes par
litre, et certains analystes prévoient la salinisation complète
du réservoir aquifère dans un proche avenir. Entre-temps,
l'utilisation non réglementée d'herbicides, de pesticides et
d'engrais présente un risque de pollution supplémentaire, vu
surtout que le réservoir aquifère se trouve près de la
surface.
La détérioration et l'épuisement rapides des ressources
en eau menacent la santé publique, sans parler de leurs
conséquences économiques et politiques. La pénurie d'eau
nuit à l'agriculture et a découragé les investissements
dans le secteur agricole. Les récoltes d'agrumes, la principale culture
de Gaza, ont chuté à cause de la forte salinité de l'eau.
Les pâturages et l'élevage ont souffert. À cause de la
mauvaise qualité de l'eau, les habitants de Gaza courent toujours le
risque de contracter le choléra ou d'autres maladies contagieuses ou
d'être victimes de parasites. En même temps, le chômage se
maintient à un taux estimatif de 60 p. 100.
Ces conditions n'ont fait qu'accroître la frustration des Palestiniens
et ont nui à la capacité de gouverner de l'Autorité
palestinienne. La crise de légitimité de l'Autorité
palestinienne a incité bon nombre d'habitants de Gaza à se
tourner vers des groupes islamiques radicaux. Ces groupes s'opposent fermement
aux ententes conclues entre l'AP et le gouvernement israélien et ont
lancé une série d'attaques, dont des attentats-suicides, contre
Israël. En guise de représailles, Israël a
procédé à des fermetures périodiques de la
frontière, a bloqué l'accès à Israël des
travailleurs de Gaza ce qui a eu pour effet de miner encore davantage
l'économie de Gaza. Pendant ce temps, l'eau se fait de plus en plus
rare, les frustrations économiques ne cessent de s'accroître et le
climat de tension entre Palestiniens et d'instabilité règne
toujours.
c) Afrique du Sud
Alors que l'Afrique du Sud a réussi à opérer la
transition vers la démocratie dans un climat relativement stable, la
violence au sein de la communauté noire n'a cessé de
s'accroître depuis les années 1980. Le plus ironique pour bon
nombre de Sud-Africains noirs, c'est que les conflits se sont aggravés
à une époque où ils avaient l'espoir de vivre dans une
société plus pacifique, par suite de la libération de
Nelson Mandela, de la légalisation de l'activité politique et de
l'abolition officielle de l'apartheid. Depuis la libération de Mandela
en février 1990 jusqu'à la fin de 1993, environ 12 000 personnes
ont perdu la vie à la suite de conflits politiques en Afrique du Sud.
L'instabilité a diminué depuis les élections, mais le taux
de criminalité demeure élevé. Dans les régions
où le contrôle politique continue d'être contesté, la
violence se maintient à des niveaux alarmants.
Les tensions exercées sur les ressources renouvelables ne constituent
pas, de toute évidence, l'unique cause de cette agitation, mais elles y
ont néanmoins joué un rôle très important.
L'écosystème sud-africain est caractérisé par de
faibles taux de précipitations et la pénurie d'eau. Le sol, qui
est toujours menacé d'érosion, n'est souvent pas propice à
la production agricole. Dans près de 65 p. 100 du pays, le taux annuel
de précipitations est inférieur à 500 millimètres,
minimum que requiert l'agriculture sèche. Le faible taux de
précipitations et la fragilité du sol limitent le potentiel
agricole du pays. Seulement 16 p. 100 des terres utilisées à des
fins agricoles sont considérées comme propices aux cultures et
seulement 4 p. 100 sont considérées comme des terres agricoles
à potentiel élevé.
Parmi les terres cultivables, treize millions d'hectares se trouvent dans
les zones agricoles commerciales, alors que seulement 2,5 millions d'hectares
se situent dans les anciens bantoustans, régions où
l'exploitation agricole s'effectue sur une petite échelle. Ce
déséquilibre, allié à d'autres problèmes de
ressources naturelles (p. ex., piètre qualité du sol et faible
taux de précipitations), a causé une importante déficience
environnementale. Les experts estiment que l'Afrique du Sud a perdu 25 p. 100
de son sol arable depuis 1900 et que 55 p. 100 du pays est menacé de
désertification. Les anciens bantoustans se trouvent dans des
régions particulièrement fragiles, où le sol n'est pas
propice au maintien des niveaux de production agricole nécessaires pour
assurer la survie de la population. La production vivrière par habitant
y a également chuté. Ces régions sont devenues des
importatrices nettes de denrées alimentaires, en partie à cause
de la dégradation des terres et de la forte croissance
démographique.
La déforestation déstabilise les sols et modifie les cycles
hydrologiques, ce qui perturbe les principaux maillons de
l'écosystème et contribue au stress environnemental. Les services
énergétiques inadéquats obligent près de 40 p. 100
de la population noire à compter sur le bois de chauffage pour la
cuisine et le chauffage. En même temps, de 12 à 16 millions de
personnes n'ont pas d'eau potable et la moitié de la population de
l'État manque d'installations sanitaires adéquates. Soixante-dix
pour cent des Noirs vivant en milieu urbain n'ont pas accès à
l'eau courante et sont obligés de dépendre de l'eau
extrêmement contaminée des rivières pour répondre
à leurs besoins quotidiens.
La population noire augmente à un rythme annuel d'environ 3 p. 100,
de sorte que, d'ici l'an 2000, elle représentera 78,3 p. 100 de la
population totale de l'Afrique du Sud. Cette croissance rapide a
contribué à aggraver le problème de la pénurie de
terres. Sous le régime de l'apartheid, la densité moyenne de la
population des bantoustans était dix fois plus élevée que
celle des milieux ruraux dominés par des Sud-Africains blancs. De 1960
à 1980, la population des bantoustans est passée de 4,5 millions
à 11 millions d'habitants, alors que leur superficie est demeurée
la même. Le taux de fécondité estimatif de 5,12 enfants par
femme, allié à l'absence de scolarité, de soins de
santé et d'emplois sûrs, permet de croire au maintien de la
croissance démographique élevée dans les anciens
bantoustans.
Le régime de l'apartheid a eu pour effet d'institutionnaliser la
répartition inéquitable des ressources environnementales.
Dénués de tout pouvoir politique ou économique, les Noirs
étaient obligés de survivre sur des terres érodées
à superficie très restreinte se trouvant dans les bantoustans et
les townships qui leur étaient réservés. Venait
exacerber ces iniquités le manque chronique de facteurs de production
agricole (p. ex., capitaux, engrais, services de vétérinaires et
nouvelles technologies agricoles). Compte tenu de leur revenu disponible de 150
$ par année, soit le seizième du revenu moyen des Blancs, les
agriculteurs noirs des bantoustans ne pouvaient pas faire les investissements
à long terme nécessaires à la protection de leurs terres.
Les droits aux terres communautaires n'étaient pas répartis
équitablement entre les habitants des anciens bantoustans. À
mesure que les ressources devenaient plus rares, la «monopolisation des
ressources» devenait un phénomène courant, les groupes les
plus puissants dans les bantoustans réussissant à s'emparer des
ressources qui restaient. En vertu des régimes politiques excessivement
corrompus en place dans les bantoustans, les droits fonciers étaient
échangés contre des faveurs politiques. La surpopulation,
l'épuisement des ressources et l'accès inéquitable aux
ressources ont à leur tour provoqué une marginalisation
écologique. Pour survivre, les gens ont dû émigrer vers des
terres marginales situées dans les bantoustans (p. ex., flancs de
collines, vallées fluviales et sweetveld). Puis, au début
des années 1980, lorsque le régime de l'apartheid a
commencé à montrer quelques faibles signes de réforme, ce
fut l'exode vers des régions urbaines considérées
marginales sur le plan de l'écologie et de l'infrastructure.
Les townships noirs, aménagés à des endroits
jugés peu utiles par la communauté blanche, étaient
souvent surpeuplés, manquaient de logements et étaient
caractérisés par une infrastructure de piètre
qualité. L'augmentation spectaculaire de la densité de la
population dans les villes, ajoutée à l'appauvrissement
causé par l'apartheid, a amené les gens à compter sur le
milieu urbain pour répondre à leurs besoins quotidiens. À
cause du surpeuplement et de la pauvreté, les nouveaux résidents
construisaient leurs maisons à l'aide de matériaux non
conventionnels retrouvés dans les décharges locales et les
immeubles publics, ainsi que de boue, d'herbe et de paille. Cette
dépendance accrue a contribué à la dégradation
encore plus importante de l'environnement et à l'aggravation des
problèmes locaux d'érosion et d'inondation. À mesure que
les pénuries ont augmenté, les gens ont émigré vers
de nouvelles zones urbaines, et le cycle de l'appauvrissement et de la
dégradation s'est perpétué.
Les institutions urbaines locales de l'Afrique du Sud se sont
montrées inaptes à répondre à la demande accrue
causée par l'exode rural. Il en a résulté une importante
fragmentation sociale : la population se divise en sous-groupes selon l'origine
ethnique, le clan familial, le township, ou l'appartenance à des
établissements informels ou à des foyers-ateliers particuliers,
dans le but de mieux protéger ses intérêts.
En 1990, la lutte politique que se livraient le Congrès National
d'Afrique (ANC) et le Parti de la liberté Inkatha pour s'emparer du
contrôle de l'Afrique de l'après-apartheid a donné lieu
à des conflits entre seigneurs de guerre dans les villes. Pendant que
les ressources se faisaient de plus en plus rares et que les institutions
sociales s'affaiblissaient, ceux-ci ont réussi à prendre
contrôle des principales ressources telles que l'eau et les terres et
à exploiter les injustices croissantes en leur faveur. Les seigneurs de
guerre des deux camps ont réussi à mobiliser des jeunes hommes
marginaux et sous-employés, et la lutte qui a suivi s'est
avérée la plus violente dans toute l'histoire du pays. Affaibli
par le processus de réforme, l'Afrique du Sud n'a pas été
en mesure de mettre en échec ces affrontements violents.
L'élection de Nelson Mandela a permis d'accroître la
légitimité de l'État. Le Programme de reconstruction et de
développement (PRD) reconnaissait les besoins de la
société, et les relations entre l'État et la
société ont adopté un caractère plus constructif et
dynamique. Toutefois, pour que les conditions continuent de s'améliorer,
il est essentiel que les ressources renouvelables dans le nouvel État en
émergence soit réparties équitablement et
gérées de manière à assurer le développement
durable.
d) Pakistan
Au cours de la dernière décennie, on a assisté à
une aggravation marquée des affrontements violents à
caractère ethnique dans les centres urbains du Pakistan. Les villes
comme Karachi, Islamabad, Hyderabad et Rawalpindi ont été les
plus durement frappées. Ces affrontements sont souvent
déclenchés par un incident isolé, en apparence fortuit,
tel un accident de la circulation ou une interruption des services publics.
L'incident est attribué à un groupe ethnique particulier et les
groupes rivaux ne tardent pas à exercer toute une série de
représailles.
Ce climat d'agitation a eu une incidence économique importante,
surtout sur Karachi, la plus grande ville et le principal port industriel du
pays, où se trouvent 65 p. 100 des industries et 80 p. 100 des
institutions financières. Récemment, des conflits armés et
une grève générale de trois jours ont provoqué une
perte de revenus de 260 millions de dollars et ont amené les
investisseurs éventuels à craindre même de visiter la
ville.
Cette violence est attribuable en partie aux problèmes chroniques du
régime, à son incapacité de longue date de pourvoir aux
besoins de la population et aux rivalités ethniques qui remontent
à l'époque de l'accession à l'indépendance en 1947.
Les pénuries croissantes de ressources ont, pour leur part,
créé des phénomènes qui n'ont fait qu'intensifier
ces conflits.
De nos jours, le Pakistan, qui compte plus de 135 millions d'habitants,
constitue le dixième pays le plus populeux du monde. Le taux actuel de
croissance démographique de 3,1 p. 100 signifie que la population de ce
pays doublera d'ici 22 ans. Cette explosion démographique est
attribuable en grande partie au taux de fécondité
élevé et à la chute rapide du taux de mortalité,
résultat d'une amélioration des soins de santé et de la
nutrition. Néanmoins, le taux de mortalité infantile demeure
élevé et ce facteur, conjugué aux faibles montants
investis dans le bien-être individuel et collectif, a contribué
à maintenir le taux de natalité à un niveau
élevé.
Moins de 20 p. 100 de la superficie totale du pays est susceptible d'une
utilisation agricole intensive, alors que 62 p. 100 est
considérée comme ayant un faible potentiel au chapitre de la
production végétale et animale et de l'exploitation
forestière. Pratiquement toutes les terres considérées
comme cultivables sont maintenant en exploitation. Un certain nombre de
facteurs empêchent l'intensification des pratiques agricoles : mauvaise
gestion des ressources en eau; propriétaires absents; fragmentation des
avoirs fonciers; fermes de taille plus restreinte à cause des lois sur
les successions; accès limité à des capitaux permettant
d'améliorer les techniques agricoles; pratiques inadéquates de
vulgarisation agricole. En même temps, la productivité des terres
est réduite à cause de l'érosion du sol par l'eau, de sa
salinité, de sa teneur en sodium et de son engorgement, des inondations
et de la perte de matière organique.
Les ressources en eau ont toujours été limitées
à cause du climat aride et semi-aride de la région. L'eau est
très polluée et de nombreuses rivières dans les villes
sont de véritables égouts à ciel ouvert. L'important
réseau d'irrigation du Pakistan est très inefficace; près
de 40 p. 100 de l'eau déviée à des fins d'irrigation est
perdue à cause de l'infiltration et de l'évaporation. De
mauvaises pratiques de gestion ont également contribué à
la salinisation du sol, ce qui a nui à la productivité agricole.
Au cours des 75 dernières années, la couverture
forestière est passée de 14,2 p. 100 à 5,2 p. 100 de la
superficie totale. L'exploitation forestière non contrôlée
a causé l'érosion et la sédimentation du sol, la
désertification de terres jadis productives, l'atterrissement des cours
d'eau dans les plaines (les rendant susceptibles aux inondations) et la
pénurie marquée de bois de chauffage et de bois de construction
(créant un fardeau économique pour les communautés
à faible revenu).
Une élite restreinte contrôle une part excessivement importante
des ressources et des industries du Pakistan. Des groupes à revenu moyen
et élevé accaparent la vaste majorité des ressources
urbaines, et près des deux tiers des logements et des services sont
destinés au quart de la population urbaine la plus riche. Par ailleurs,
dans les milieux ruraux, les grands propriétaires terriens dominent et
jouissent de tous les avantages que procure l'agriculture. Les réformes
agraires n'ont pas réussi à modifier en profondeur le
régime très inéquitable de répartition des
richesses agricoles.
Le phénomène de la «monopolisation des ressources»
vient exacerber ces iniquités. À mesure que les ressources
renouvelables sont devenues de plus en plus rares, les groupes influents s'en
sont emparés à des fins personnelles, c'est-à-dire pour
s'enrichir eux-mêmes tandis que la majorité de la population
sombrait encore davantage dans la pauvreté. Dans l'industrie du bois
d'oeuvre, des particuliers puissants se sont servis d'importants transferts de
fonds de développement de l'État pour ouvrir des forêts
à l'exploitation.
L'explosion démographique et l'accroissement des activités
commerciales et industrielles ont contribué à l'augmentation de
la valeur des terres dans les villes. Les spéculateurs immobiliers font
des affaires florissantes dans les établissements de squatters,
où les terres sont divisées en lots, puis vendues à des
groupes à faible revenu, moyennant un débours initial minime dans
la plupart des cas. Toutefois, des taux d'intérêt excessivement
élevés sont imposés pour l'achat initial et les services,
ce qui accable souvent trop les acheteurs et les maintient dans la
pauvreté.
La stagnation et le déclin de la productivité agricole, en
partie attribuables à la dégradation de l'environnement et
à la pénurie de ressources qui vont toujours en s'aggravant,
entraînent la pauvreté et le chômage dans les milieux
ruraux. Malgré que 70 p. 100 de tous les ménages en milieu rural
sont qualifiés d'agricoles, bon nombre d'entre eux ne gagnent pas
suffisamment d'argent pour répondre à leurs besoins même
les plus fondamentaux. Dans une étude sur l'agriculture menée
dans le Pendjab en 1981, on a constaté que le quart de tous les petits
agriculteurs (représentant la majeure partie des agriculteurs de la
province) étaient obligés de recourir à d'autres moyens
pour arrondir leurs revenus. D'autres sources ont révélé
que le taux de sous-emploi en milieu rural à l'échelle du pays se
rapprochait de 65 p. 100.
L'appauvrissement des milieux ruraux a donné lieu à un
important exode vers les centres urbains, ce qui a eu pour effet de mettre
à rude épreuve l'infrastructure de ces villes. Non seulement la
qualité et la disponibilité des ressources et des services (p.
ex., logements, eau potable, électricité, essence, services de
drainage et d'égout) se sont détériorées
rapidement, mais les établissements de squatters, souvent
situés sur les terres les plus marginales, se sont multipliés. De
nos jours, les squatters représentent de 20 à 25 p. 100 de
la population urbaine du Pakistan.
À Karachi, la population augmente de 6 p. 100 par année. Par
contre, les services urbains ne s'accroissent que de 1,2 p. 100, le
gouvernement ne réussit à répondre qu'au huitième
des demandes de logements pour personnes à faible revenu et les
administrations locales n'arrivent même pas à fournir les services
de base. Seulement 15 à 20 p. 100 des eaux usées sont
traitées; le reste se déverse directement dans la mer. Alors que
33 p. 100 des déchets solides sont transportés à des
décharges, les pilleurs dans les rues s'occupent du reste. Il n'est pas
étonnant que les maladies d'origine hydrique attribuables à des
conditions sanitaires malsaines interviennent pour 25 à 30 p. 100 des
cas d'hospitalisation et de visites dans les dispensaires à
l'échelle du pays et pour environ 40 p. 100 des décès.
Cet exode rural massif contribue à intensifier les rivalités
qui persistent entre différents groupes sociaux, ceux-ci se retrouvant
en contact étroit dans des conditions socio-économiques
extrêmement difficiles. Cette situation renforce le sens de
l'appartenance et la cohésion des groupes et crée une vive
concurrence entre eux pour l'obtention des ressources urbaines en diminution
constante.
Pour leur part, les administrations étatiques et locales sont de
moins en moins aptes à éliminer les injustices et à
satisfaire aux besoins de la population. Ces administrations, aux liens
hiérarchiques mal définis, disposent de peu de pouvoirs
d'imposition et ont très peu de comptes à rendre. L'absence de
mécanismes de soutien institutionnalisés et pacifiques a
porté atteinte à la légitimité du gouvernement et
à contribué à une montée de la violence entre
groupes ethniques ou classes dans la plupart des cas. De nos jours, on continue
d'assister à des affrontements violents entre groupes rivaux.
Conclusion
Dans chacun des cas mentionnés précédemment, les
pénuries de ressources renouvelables se sont ajoutées à
d'autres facteurs politiques, économiques et sociaux pour engendrer des
conditions propices à la violence. En soi, ces pénuries ne font
que jouer un rôle indirect, quoique complexe, dans l'éclatement
d'incidents violents. En fait, il arrive rarement qu'elles soient le seul
facteur à avoir contribué à la violence.
Pourtant, il serait imprudent de faire abstraction des pénuries pour
la simple raison qu'elles ne constituent qu'un facteur parmi d'autres menant
à la violence. Dans tous les pays en développement, d'importants
segments de la population continuent de dépendre presque
entièrement des ressources renouvelables pour leur survie. En
négligeant d'accorder l'attention voulue à cette
dépendance, on risque de sous-estimer les tensions sociales que les
pénuries de ressources renouvelables risquent de provoquer.
Il ne serait pas prudent non plus, dans l'analyse des causes de conflits, de
considérer automatiquement la pénurie de ressources comme un
facteur secondaire. Comme il a été mentionné
précédemment, les pénuries peuvent avoir un effet
réciproque sur la dimension politique et économique des
régimes sociaux. Par exemple, elles peuvent favoriser la création
de coalitions puissantes ou inciter les élites à monopoliser les
ressources. En outre, si les pénuries graves deviennent
irréversibles, elles peuvent engendrer des conflits sociaux permanents
et causer un niveau de dégradation qui continuera de miner la
société bien après l'élimination des facteurs
politiques et économiques qui y ont donné naissance.
Les pénuries extrêmes peuvent avoir des répercussions
qui ne se limitent pas aux sociétés qui en sont directement
victimes. Les insuffisances de ressources contribuent à
déstabiliser les sociétés, rendent les États plus
susceptibles à des prises de contrôle internes par des
régimes plus répressifs et les portent à poser des actes
plus téméraires et plus menaçants sur le plan
international. Les risques pour les États voisins et les menaces envers
la sécurité et la stabilité peuvent donc
s'accroître. De façon plus générale, les conflits
d'origine environnemental peuvent influer sur les politiques économiques
internationales, entraîner l'exode massif de réfugiés et
provoquer des catastrophes humanitaires complexes faisant appel à l'aide
et aux ressources de l'ensemble de la communauté internationale.
Il n'existe pas de solution unique au problème de la
corrélation entre les pénuries de ressources et les conflits. De
vastes mesures gouvernementales, régionales et multilatérales
seront sans doute nécessaires pour régler les problèmes
que posent ces pénuries. Étant donné que l'impact de
conditions particulières varie d'une population à l'autre, il
importe que toute politique efficace tienne compte du contexte dans lequel elle
sera appliquée.
Les solutions monétaires ne conviennent pas toujours. Des mesures peu
coûteuses destinées à améliorer les conditions
humaines et à stimuler le développement économique peuvent
se révéler très efficaces. Dans cet ordre d'idées,
des politiques qui favorisent la scolarité et l'alphabétisation
peuvent s'avérer particulièrement bénéfiques, et
ce, à la fois pour contenir la croissance démographique et pour
promouvoir le développement durable.
Quelles que soient les solutions envisagées, on ne peut faire
abstraction du lien qui existe entre les pénuries de ressources et les
conflits. En fait, vu les tendances qui émergent dans le contexte
international de la sécurité, les décideurs jugeront sans
doute qu'il est nécessaire plus que jamais auparavant de tenir compte,
dans leurs analyses des éléments qui pourraient à l'avenir
menacer la sécurité, des considérations relatives à
l'environnement et au développement, en plus des facteurs politiques et
militaires conventionnels.
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